Mamadou Bocoum est Directeur de la radio Kaoural et Coordinateur régional de l’Union de radiodiffusion et de télévision (URTEL) à Mopti, dans le centre du Mali. Passionné par son travail, il défend l’importance des radios communautaires dans le quotidien de la population de la région. Selon lui, la transmission d’informations précises et impartiales est cruciale pour réduire les tensions intercommunautaires et autonomiser les gens. « Obtenir des informations opportunes, efficaces, justes et exactes dans chaque village, chaque communauté, en direction de chaque citoyen est essentiel pour abaisser les tensions, en particulier de nos jours avec la recrudescence de la violence dans la région. C’est là que les radios communautaires ont un rôle à jouer pour désamorcer les tensions ».
Radio Kaoural, à l’instar de huit autres stations de radio communautaires de Mopti, ne pouvait pas diffuser en dehors de la ville où elle opère. C’est après un projet à impact rapide (QIP), parrainé par la MINUSMA, que cette plage de fréquences radio a été élargie, ce qui leur a permis d’atteindre des zones éloignées grâce à de puissants émetteurs.
Pour le directeur de la radio Kaoural, une portée plus puissante des fréquences radio a pour résultat que les informations sont maintenant disponibles dans toute la région. Les populations isolées peuvent désormais être informées, les rumeurs peuvent être dissipées plus facilement, les tensions entre les communautés locales peuvent être réduites. Ce dernier point est très important, tant ces communautés isolées se sentent souvent impuissantes pendant les conflits.
Bah Samaké, 32 ans, et commerçant du marché principal de Mopti, est un auditeur régulier de la station de radio. Sa vielle radio serrée contre son oreille, déclare : « la radio change nos vies. Cela nous donne le sentiment de faire partie d’une société. Nous pouvons nous tenir au courant de ce qui se passe ici. Nous recevons des nouvelles régionales, nous recevons des nouvelles locales, nous entendons des messages ».
Renforcer les radios communautaires
Le QIP de la MINUSMA a renforcé neuf radios communautaires en plein cœur du Mali.
Kaoural Radio, Radio Jamana, Radio Guintan, Radio Saghan, Radio Tolérance, Radio Dakan, Radio Kélénya, Radio Kounani et Radio Maria bénéficient d’un projet de 28 millions de FCFA.
Les radios ont chacune reçu une console de 12 pièces, un coupleur, des ordinateurs portables, des microphones avec supports et casques, des enregistreurs vocaux numériques. L’équipement et le système d’antenne de guidage à large bande installés dans une tour de 40 mètres ont révolutionné la manière d’atteindre le public. Cela permet d’élargir l’audience.
Améliorer la qualité des programmes radiophoniques et permettre à ces productions d’atteindre des zones isolées fait partie de la stratégie visant à promouvoir la cohésion sociale et à sensibiliser à une culture de la paix. « L’antenne était tombée à cause du vent en 2013. Aujourd’hui, grâce au projet MINUSMA, nous avons une antenne de 40 mètres sur le toit de l’immeuble, ce qui nous permet de toucher à nouveau les auditeurs bien au-delà des limites de la municipalité », a déclaré Kanda Kelly, directrice de Radio Saghan.
À Mopti, où l’éloignement et des infrastructures limitées isolent de nombreuses communautés, les radios communautaires sont souvent les seuls moyens de les relier les unes aux autres et au monde. Que ce soit dans une grande ville, une petite communauté nomade ou au fin fond du désert, beaucoup de gens écoutent la radio.
Cette année, la violence intercommunautaire entre les membres armés du groupe ethnique Dogon, principalement des agriculteurs, et les éleveurs peuls, a atteint un nouveau niveau, faisant des centaines de morts et déplaçant des milliers de personnes des deux communautés, qui coexistaient depuis des siècles, dans en harmonie exemplaire.
« L’objectif est de créer un dialogue, que les gens se parlent. Pour la promotion de la paix et de la tolérance », a déclaré Mamadou Boucoum. « Nous diffusons une variété de messages promouvant la paix, la non-violence et la guérison. Nous rapportons des informations importantes et fournissons aux auditeurs des messages permettant de faire face aux conséquences à long terme des conflits violents. Les paysans n’étant pas en ville, il est important de diffuser les informations au-delà des frontières. L’émetteur fourni par la MINUSMA nous permet de le faire ».
Video of Les radios communautaires des acteurs pour la paix dans le centre du Mali
Une ligne de vie dans un pays en crise
Dans un pays où seulement 33% de la population sait lire et écrire, le Mali possède l’un des réseaux de radio communautaire les plus puissants d’Afrique. Ce pays d’Afrique de l’Ouest et enclavé compte plus de 170 stations de radio privées, dont 121 sont des radios communautaires, principalement basées en milieu rural.
« Sur Radio Jamana, nous considérons le rôle de la radio locale comme un rôle d’information et d’éducation. Ils informent, sensibilisent, échangent avec les auditeurs. L’éducation par l’information est au cœur de la mission de notre radio », a déclaré Oumar Diabaté, directeur de la radio Jamana.
Les habitants de Mopti, touchés par la crise actuelle, ont un besoin urgent d’informations fiables, équilibrées et livrées en temps voulu, et il y a de fortes chances pour que ces neuf radios communautaires renforcées commencent à combler les lacunes. (minusma)